Pendant longtemps, il a eu peur de ne pas parler. Salah Abdeslam a finalement beaucoup parlé depuis le début du procès du 13 novembre. On pensait donc qu’il s’expliquerait, mercredi 30 mars, sur le moment le plus attendu depuis le début des pourparlers : son interrogatoire le soir des attentats. Il a choisi ce jour pour revendiquer son droit au silence. Ensuite, nous avons pensé que la journée était passée et que les maigres espoirs de compréhension étaient partis. Mais après deux heures de questions sans réponse, un petit miracle s’est produit : l’accusé a accepté de répondre à un avocat bourgeois, qui a réussi à trouver les mots pour accueillir sa famille. Lire aussi Article destiné à nos abonnés Dans le procès des attentats du 13 novembre, Salah Abdeslam agace, le public applaudit, l’audience est interrompue
Cette journée d’audience déroutante était à l’image de Salah Abdeslam, aussi polyvalent dans le rôle de l’accusé qu’il semblait l’être dans celui du kamikaze : il ne fait pas toujours ce qu’il dit et il ne dit pas toujours ce qu’il a fait. Son ambivalence dans ce procès reflète-t-elle son état mental le soir des attentats ? Cette question était au cœur de ce troisième interrogatoire de fond : le seul parachutiste survivant a-t-il abandonné au dernier moment ou y a-t-il été contraint par une panne technique ? On attendait ses explications quand, au début de l’audience, l’accusé ôta son masque et dissipa tout espoir : “Bonjour Monsieur le Président, aujourd’hui je veux user de mon droit de garder le silence…” Le Président, Jean -Louis Périès, tente de cacher sa frustration : « A. C’est votre droit, mais ce n’était pas prévu du tout. Jusqu’à présent, vous avez répondu à de nombreuses questions. Mais ici, on est mal compris. Permettez-moi d’insister. – Moi aussi, Monsieur le Président, j’insiste. Mon silence est juste, je n’ai pas besoin de me justifier. »

“C’est vraiment de la lâcheté à l’état brut”

Le président mène son interrogatoire fictif : les questions du tribunal se succèdent et contredisent le silence de l’accusé. S’agissant du parquet national antiterroriste, l’un des trois représentants du parquet, Nicolas Le Bris, exprime une colère froide : « Salah Abdeslam avait promis de donner des explications et il ne l’a pas fait. Il se considère comme une star, taquine et se tait, savoure les réactions qu’il provoque… Nous avons la confirmation, Monsieur Abdeslam, que la lâcheté est bien le signe des terroristes. Il n’y a pas une once de courage en toi, c’est vraiment de la lâcheté à l’état brut… » Lire aussi Article pour nos abonnés Au procès du 13 novembre, les deux visages de Salah Abdeslam
Cela fait près de deux heures que le dialogue sourd a commencé lorsqu’un avocat d’un parti politique a pris la parole. Claire Josserand-Schmidt était parvenue, lors de précédents interrogatoires, à nouer un dialogue délicat et sensible avec Salah Abdeslam, qui semble lui être reconnaissant. D’une voix bienveillante, elle rappelle qu’elle avait promis de répondre à certaines de ses questions le moment venu : Il ne vous reste plus qu’à lire 64,02% de cet article. Ce qui suit est réservé aux abonnés.