Daria Duguine, une journaliste russe, a été tuée samedi lorsque sa voiture a explosé dans la banlieue de Moscou. La nouvelle a été annoncée dimanche par l’agence de presse russe TASS. Selon la commission d’enquête russe, qui dit avoir trouvé un engin explosif, “le crime a été planifié à l’avance et ordonné”.
· Qu’est-il arrivé?
Samedi, vers 21h00 locales (20h00 à Paris), Daria Douguine quitte le festival “Traditsya”, dans la voiture de son père, Alexandre Douguine, qui l’accompagnait. Cet idéologue influent devait monter avec elle, mais a changé d’avis à la dernière minute. Il prend un autre véhicule et un autre itinéraire pour revenir. Sa fille, partie seule, parcourt une quarantaine de kilomètres sur l’autoroute au sud-ouest de Moscou. Puis, au niveau de la petite commune de Bolchïe Viaziomy, son véhicule a explosé et pris feu. Selon les autorités russes, il a été causé par un engin explosif placé sous la voiture côté conducteur. Daria Dugin a succombé à ses blessures sur les lieux.
· Qui sont Daria et Alexander Dugin ?
Née en 1992, Daria Douguine a travaillé comme rédactrice en chef du magazine Monde Uni International. Elle y a défendu des positions qui lui ont valu les sanctions britanniques en juillet, tandis que le Royaume-Uni l’a accusée de répandre “de la désinformation sur l’Ukraine”. Elle partageait avec son père des convictions politiques nationalistes et anti-ukrainiennes. « Il a beaucoup parlé [à la télévision] sur la question de l’Ukraine. Il a pleinement soutenu cette guerre et a travaillé pour Tsargrad, une chaîne de télévision appartenant à des oligarques russes”, explique Denis Strelkov, journaliste russe à RFI. Alexandre Douguine, le père de la victime, est l’auteur de plusieurs essais géopolitiques. Présentées comme “le Raspoutine de Poutine” par les médias occidentaux, ses théories trouvent un écho dans la politique récente de la Russie : ultra-nationalisme, opposition à l’Occident ou aux projets eurasiens.
• Un acte prémédité ciblant peut-être “le cerveau de l’idéologie russe”
Les autorités russes ont lancé une enquête et penchent déjà pour un acte prémédité. Eugène Berg, ancien ambassadeur et expert de l’Ukraine, expose plusieurs cas à BFMTV. L’Ukraine, rivale politique et militaire, aurait pu soutenir l’attaque d’Alexander Dougin. Il y a trois autres possibilités. “Ça pourrait être des cercles mafieux, mais ça reste peu probable”, explique Eugène Berg. “C’est peut-être une affaire interne des services de renseignement russes, c’est possible mais difficile à comprendre. Enfin, en Russie, ce peuvent être des gens qui s’opposent à la guerre. Comme ils ne peuvent pas toucher les responsables, qui sont bien protégés, ils veux toucher le cerveau de l’idéologie [russe]”. L’influence d’Alexandre Douguine se fait particulièrement sentir dans les positions russes sur l’Ukraine. Déjà en 2008, le philosophe avait appelé à l’annexion de l’Ukraine par la Russie, comme le rapportait la BBC en 2014. Une idée qu’il a confirmée à plusieurs reprises. Proximité avec des régimes séparatistes pro-russes, soutien à la guerre, position idéologique : ces positions auraient pu faire de lui une cible de “l’engin explosif” que disent les autorités russes.
Le leader pro-russe pointe du doigt Kyiv, la Russie “contrôle”
Sur Telegram, le chef séparatiste pro-russe de la République populaire de Donetsk (DNR), Denis Pushilin, estime que “des terroristes du régime ukrainien ont tenté de tuer Alexander Dugin, mais ont fait exploser sa fille”. « Si la piste ukrainienne est confirmée […]et cela doit être vérifié par les autorités compétentes, ce sera la politique de terrorisme d’Etat mise en œuvre par le régime de Kiev”, commente la représentante de la diplomatie russe Maria Zakharova sur Telegram.
Kyiv nie toute implication
La présidence ukrainienne nie tout rôle dans la mort de Daria Dugin. “L’Ukraine n’a sans doute rien à voir avec l’explosion d’hier [smaedi soir, NDLR]parce que nous ne sommes pas un État criminel”, a déclaré Mykhailo Podoliak, conseiller à la présidence ukrainienne, lors d’une intervention télévisée.