Sur 146.500 candidats au dernier concours de recrutement d’enseignants, seuls 19.838 candidats ont été acceptés, tandis que 23.571 postes étaient ouverts au public, selon le ministère. Dans certaines branches de l’enseignement secondaire, le taux de vacance dépasse 30 %. En physique-chimie, seuls 66,7 % des places sont pourvues, contre 80 à 100 % les trois années précédentes. En mathématiques, seules 68,5% des places sont couvertes contre 84 à 92% il y a un, deux ou trois ans. En lettres modernes, 83,5 % des places sont couvertes, bien en deçà des 98 à 100 % des trois années précédentes.
A la demande des syndicats, une liste complémentaire a donc été ouverte. Pour chaque désistement de candidat accepté, un prétendant est constitué sur la liste d’attente pour être constitué comme enseignant, explique le syndicat SE-Unsa à franceinfo. Il reste cependant un déficit de 3 733 postes vacants dans l’enseignement public (et 279 dans le secteur privé sous contrat) à l’issue du concours. Le syndicat a demandé au ministère d’embaucher davantage de candidats à partir de la liste supplémentaire. Une requête qui n’a pas encore trouvé d’écho. Pour pallier ce manque d’enseignants, le ministère recourt à une solution désormais courante : les contractuels. Ils représentent déjà environ 8% des enseignants du secondaire, selon le ministère. “C’est vrai qu’on a recours à un pourcentage d’enseignants contractuels qui est important”, a reconnu Pap Ndiaye. Ainsi, de nouveaux contractuels ont été recrutés en juin lors des controversés “job dating”, des entretiens d’embauche organisés dans de nombreuses académies. D’autres continuent d’être embauchés en cas de sinistre avant la rentrée scolaire. Pour la première fois cette année, les titulaires de contrat ayant déjà reçu leur affectation ont été invités par leur rectorat à un séminaire de formation quelques jours avant la rentrée, suite à l’ordre du ministère de l’Éducation. “A Créteil, les enseignants contractuels auront deux jours de formation sur leur discipline et deux jours de formation sur leurs droits et devoirs pour savoir se comporter face aux élèves”, rapporte Sophie Vénétitay, secrétaire générale du Snes-FSU. Certains titulaires de contrat ont également été invités à “suivre des modules de formation vidéo sur leur temps libre”, ajoute le secrétaire général du Snes-FSU. Sophie Vénétitay déplore la scolarisation rapide, qui est un symptôme de “l’habituelle chamaillerie des presbytères”. “Enseigner est un métier qui s’apprend, on ne peut pas s’entraîner deux jours avant la rentrée ou entre deux cours”, déplore-t-il. “Ces collègues devraient être formés à leur temps de travail. En les faisant suivre des formations sur leur temps libre, on alourdit leur charge de travail », précise-t-il. Dorothée Crespin, déléguée nationale en charge des contractuels à la SE-Unsa, encourage certes les personnes intéressées à se rendre à sa formation, mais s’interroge sur la nature de “l’invitation”. “La plupart des contractuels n’ont pas encore signé leur contrat, ils ne savent pas s’ils seront rémunérés pour cette formation”, explique-t-il. “Nous sommes totalement favorables à une formation avant la rentrée, ce qui pose la question est de savoir si ces heures seront rémunérées”, poursuit-il. Tous les entrepreneurs ne pourront pas bénéficier de cette formation. Contactée par franceinfo, Stéphanie, enseignante contractuelle depuis de nombreuses années dans le Grand-Est, n’a reçu aucune invitation à se former et n’a pas encore été informée de son affectation pour l’année scolaire. Une situation qui n’est pas isolée. Cette incertitude est également constatée par d’autres enseignants contractuels à quelques jours de la rentrée. “Beaucoup de titulaires de contrat ne savent pas dans quel établissement et à quels niveaux ils vont enseigner, quel sera leur programme”, rapporte Dorothée Crespin. Une situation d’autant plus aggravée que certains de ces contractuels sont passés par le concours de recrutement d’enseignants. C’est le cas de Stéphanie : “Depuis cinq ans, j’ai des emplois à temps plein en tant qu’intérimaire. L’année dernière, j’ai passé les grandes capes écrites, mais je n’ai pas été assez ‘convaincante’ aux oraux. J’ai raté admission de quelques points…” Elle l’enseignante est dans un malentendu : l’Éducation nationale lui confie des cours depuis plusieurs années, mais lui refuse le statut d’enseignante titulaire. « On vit mal ce statut car, quand on est en poste, il y a une légitimité qu’on n’a pas dans une salle de faculté. Nous avons le sentiment qu’ils ne nous font pas double emploi.” Stefania, enseignante contractuelle franceinfo Stéphanie témoigne également de la difficulté de préparer les cours pour ses futurs élèves. “Nous sommes dans un flux tendu, je ne serai à mon niveau que quelques jours avant la rentrée, le 26 ou 28 août. Pourtant, à votre arrivée, personne ne va vous donner des tas de cours. » Par ailleurs, elle déplore de ne pas avoir accès au même niveau d’encadrement et de formation que les professeurs stagiaires. « Il n’y a pas de tutorat pour les contractuels. Vous devriez avoir un enseignant, tout comme les stagiaires. Nous avons de gros problèmes, j’aimerais avoir un professeur pour pouvoir aller de temps en temps assister à des séminaires.” Le recours aux sous-traitants “est un pansement sur une jambe de bois”, prévenait déjà début juillet le représentant du SE-Unsa Olivier Flipo, au micro de franceinfo. Une position partagée par Sophie Vénétitay. “Pour nous, la première solution est de s’assurer que les concours recrutent, que tous les postes sont promus au concours”, précise le secrétaire général du Snes-FSU. Cependant, il ne s’agit pas d’abaisser les critères de recrutement. “Il faut jouer sur le levier salarial et sur le levier des conditions de travail pour redonner de l’attractivité au métier d’enseignant”, explique le syndicaliste, également professeur à la FTA.