L’attente était-elle trop élevée? Une semaine après avoir promis “d’éclairer” le tribunal d’exception sur son rôle dans les attentats du 13 novembre, Mohamed Abrini a finalement donné quelques précisions au cours des quelque six heures qu’a duré son audition. Le trentenaire, chemise blanche, cheveux courts et barbe rasée, a cependant confirmé d’emblée que, selon les plans initiaux, il était prévu de faire partie des commandos. “Début septembre, on m’a dit ‘tu feras partie d’un projet’”, commence-t-il. Son interlocuteur n’est autre que son ami d’enfance, Abdelhamid Abaaoud, l’un des chefs d’entreprise de l’abattage. “Mais je ne sais pas si c’est le Bataclan, c’est la France”, s’est-il empressé d’ajouter. Je sais juste qu’il y a un projet. » Les mains plaquées contre la boîte, ce Molenbeekois, en Belgique, avoue n’avoir pu dire “non” à Abaaoud que le 12 novembre. Cependant, selon lui, il sait presque immédiatement qu’il ne participera pas à l’attaque. “Pour moi, c’est impossible, je ne peux pas aller tuer des gens dans la rue, je ne peux pas attaquer des gens désarmés. S’il n’ose pas s’ouvrir au commandant en chef, il jure l’avoir avoué à Brahim Abdeslam en septembre. Pourquoi alors participer à la « chasse à la mort », la veille des attentats, avant de s’enfuir dans la nuit ? Pour un dernier au revoir, dit-il. Pourquoi participer à la location de voiture ou à la planque s’il a décidé de ne pas participer ? Une fois que les questions deviennent plus précises, les réponses deviennent confuses. « Moi, à ce moment-là, j’étais perdu », « Pourquoi est-ce que je fais ça ? Je ne sais pas… “

“Vous ferez partie du voyage”

Il avoue qu’il savait qu’il allait y avoir des attentats, que “des gens allaient être tués”, mais confirme qu’il ne connaissait pas toutes les grandes lignes du projet, la date de l’attentat sur les cibles visées. En revanche, il est persuadé qu’en raison de son départ, Salah Abdeslam intègre les commandos dans les extrêmes. “Même si je n’ai pas assisté au débat, vu qu’il y avait un gilet (explosif) supplémentaire, Brahim Abdeslam a dû parler à Salah en lui disant ‘tu feras partie du voyage’”, assure-t-il, décrivant le plus. accusé d’être soumis à son frère aîné. Tout au long de l’audience, il a donné l’impression qu’il cherchait à l’éclaircir, affirmant que ce dernier ne devait pas “être dans la boîte”, “il ne pouvait pas le faire”. Une version qui peine à convaincre – et c’est péjoratif – le procureur. “Pour une telle opération, vous pouvez imaginer qu’ils ne seront pas satisfaits de quelqu’un qui hésite. Ils vous impliquent car ils vous font confiance ! Insiste Nicolas Le Bris, l’un des trois procureurs généraux, qui confronte méthodiquement l’accusé aux contradictions de son récit. Pourquoi se rend-il à Paris sans ses clés et ne prévoit-il pas de retour à Bruxelles ? Pourquoi est-il sélectionné alors qu’il aurait avoué dès son voyage en Syrie à l’été 2015 qu’il ne voulait pas se battre ? “Ce n’est pas parce que j’ai dit non qu’ils partent immédiatement. »

“C’est toujours pareil, je savais que je n’allais pas exploser”

Si sa détermination à ne pas être membre des parachutistes du 13 novembre était telle qu’il la décrit, il pourrait appeler la police, bien que de manière anonyme, soulignant plusieurs avocats des partis politiques. Mohamed Abrini connaissait la gestion de la planque et savait qu’il y avait des armes et des explosifs. “C’était compliqué”, raconte-t-il, expliquant qu’il avait été pris dans un conflit de foi avec ses amis d’enfance, ses convictions, tout en craignant des représailles. Et pourquoi participer, quatre mois plus tard, aux attentats de Bruxelles du 22 mars 2016 ? Mohamed Abrini, surnommé “l’homme au chapeau” après avoir été filmé à l’aéroport de Zaventem en train de pousser une valise pleine de TATP, un puissant explosif, avant de repartir sans déclencher sa sortie, ne fournit pas vraiment d’explication, indiquant seulement qu’il habite Le Novembre 13 attentats avaient mis un terme à ses projets, notamment de se marier et d’emménager avec sa fiancée. “Quand tu suis quelqu’un et qu’il te met dans une planque, tu sais que tout est fini”, insiste-t-il. Le 22 mars, poursuit-il, les attentats de l’aéroport de Zaventem et du métro de Bruxelles « n’étaient pas planifiés » et ont précipité l’arrestation de Salah Abdeslam le 18 mars. « C’est toujours pareil, je savais que je n’allais pas exploser. “me relever”, assure le tribunal. Cet aspect de l’affaire fera l’objet d’un autre procès, à partir de la mi-octobre à Bruxelles.