Que s’était-il passé ?
Le 8 mars 2021, Alisha avait retrouvé J., l’un des deux prévenus, à un quai de Seine à Argenteuil, un endroit isolé au pied d’un viaduc de l’autoroute A15. Un guet-apens tendu par les deux suspects : le second, T., attendait caché derrière un pilier, selon Eric Corbaux, le procureur de Pontoise, sur la base de leurs déclarations en garde à vue. Le garçon a ensuite violemment frappé la victime, lui donnant des coups de poing puis des coups de pied à la tête. Avant de jeter la jeune fille sur la Seine avec son co-accusé. En mars 2021, le procureur expliquait que les deux adolescents « voulaient effacer les traces des violences commises ». Alisha était alors encore consciente. Selon le procureur, les prévenus ont admis qu’elle avait les yeux ouverts. L’autopsie a révélé « d’importants hématomes sur le crâne » mais a conclu « à une mort par suffocation qui pourrait être compatible avec une mort par noyade ». Le pont sous lequel le corps sans vie d’Alisha a été retrouvé sur la Seine, ici le 9 décembre 2021, neuf mois après les événements. (MAXIM GROUS / HANS LUCAS / Agence Française) Après les événements, T. est rentré chez lui. Là, il avait raconté à sa mère que lui et sa compagne, J., venaient de “frapper une jeune fille” et qu’il “est tombé sur la Seine”. C’est cette mère qui a prévenu la gendarmerie d’Argenteuil le jour même, en début de soirée, après avoir découvert les vêtements tachés de sang de son fils. Au même moment, la mère d’Alisha, inquiète de ne pas avoir de nouvelles, signale sa disparition à la police. Le corps de l’adolescente a été retrouvé dans la nuit, dans la Seine, au pied du lieu où elle avait été agressée. T. et J., qui avaient eu recours à une de leurs connaissances, ont été arrêtés dans la nuit. Deux jours plus tard, le 10 mars, ils ont été inculpés et placés en détention provisoire.
Quelle était la relation d’Alisha avec les deux accusés ?
Alisha, T. et J. étaient “trois amis au début”, expliquait alors le procureur. Ils s’étaient rencontrés quelques mois plus tôt, à la rentrée, dans leur classe d’un lycée professionnel d’Argenteuil. “Il y avait alors un lien affectif entre eux”, raconte Eric Corbaux. D’abord entre Alisha et T., puis entre T. et J. Malgré ce scénario, “les deux jeunes filles avaient entretenu une relation amicale”, qui s’est ensuite détériorée. Dans les semaines qui ont précédé sa mort, Alisha avait pénétré par effraction dans son téléphone. T. et J. avait posté des photos sur le réseau social Snapchat montrant la jeune fille en lingerie. Une querelle avait également éclaté entre la victime et J. dans leur lycée. L’établissement avait provisoirement exclu les deux mis en cause pour “un état de tension entre ces trois étudiants”. T. et J. devaient se rendre en conseil de discipline le 9 mars 2021, au lendemain des faits. Lors d’une marche blanche une semaine plus tard, rassemblant plus de 2 000 personnes, des banderoles proclamant “Non au revenge porn” et “Stop au harcèlement”. Le gouvernement avait réagi à l’affaire, la ministre de la Nationalité Marlène Schiappa annonçant la création d’un “comité anti-harcèlement”. Une annonce qui ne semble pas s’être concrétisée depuis.
De quoi les deux adolescents sont-ils en danger ?
Les deux prévenus avaient été inculpés de “meurtre”, tandis que l’enquête a mis au jour des preuves d’intention. Selon Le Parisien, l’enquête a révélé des échanges dans lesquels les deux adolescents évoquent un meurtre et une enquête en ligne de T. sur la peine infligée au meurtrier d’un mineur. Les avocats des accusés ne se sont pas exprimés avant le procès, qui commence lundi. “Ce serait bien de ne pas déclarer ces enfants coupables en conférence de presse”, a écrit l’avocat Frank Berton, qui défend le garçon, sur Twitter en mars 2021. “Il y a une instruction, il y aura un procès, mon client a raison la défense “. Âgés de 15 ans au moment des faits, J. et T. ne sont pas passibles de la réclusion à perpétuité, mais d’une peine maximale de 20 ans. La majorité pénale est fixée à 18 ans. Détenus dans certains quartiers pour mineurs, ils seront jugés par un tribunal pour mineurs, dont les audiences se tiennent toujours à huis clos.