L’UE a averti vendredi Pékin que tout soutien à Moscou contournant les sanctions occidentales nuirait à ses liens économiques avec l’Europe, son principal partenaire commercial, et a appelé la Russie à faire pression pour mettre fin au conflit en Ukraine. “Nous avons clairement indiqué que la Chine ne devrait pas intervenir dans les sanctions (contre Moscou) si elle ne les soutient pas”, a déclaré la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen après un entretien télévisé avec le président chinois Xi Jinping. Alors que Pékin refuse de condamner l’invasion de l’Ukraine, défendant son amitié “stable” avec Moscou, l’UE veut empêcher la Chine de soutenir activement la Russie en dynamisant ses marchés des hydrocarbures ou par des aides financières. Un tel soutien “ternira sérieusement la réputation de la Chine en Europe”, où les entreprises “voient comment les pays sont positionnés”, a déclaré von der Leyen, estimant que la position de Pékin influencerait “les décisions d’investissement à long terme”. “Nous espérons que la Chine tiendra compte de l’importance de son image internationale et de sa relation économique avec l’UE”, a ajouté Charles Michel, président du Conseil européen, qui a assisté au sommet virtuel. Européens et Chinois sont interdépendants : l’UE absorbe 15 % des exportations du géant asiatique, qui lui fournissent des produits industriels et des composants critiques. La Chine représente 10 % des exportations de Twenty-Seven, un marché clé pour les constructeurs européens, notamment allemands. “Une prolongation du conflit, avec des turbulences dans l’économie mondiale, n’est dans l’intérêt de personne, certainement pas dans celui de la Chine”, a déclaré Ursula von der Leyen, ajoutant que Pékin “doit assumer la responsabilité de traduire en justice la Russie dans les négociations de paix”. Les Européens “cherchent à influencer les calculs stratégiques des dirigeants chinois en pointant du doigt les coûts financiers qu’ils vont encourir”, a déclaré Grzegorz Stec de l’Institut allemand Merics.

– “Facteurs stabilisateurs” – Le Premier ministre chinois Li Keqiang, qui s’est également entretenu vendredi avec des dirigeants européens, a réitéré que Pékin “s’oppose à la fois à la guerre froide et à la guerre froide, bloque les divisions et refuse de prendre position”, selon Wang Lutong, un haut responsable chinois. Xi Jinping a appelé l’UE à “formuler sa propre perception de la Chine et à poursuivre sa propre politique envers Pékin”, selon un communiqué de presse de l’Etat chinois. Pour le régime communiste, les Européens se laissent entraîner dans un conflit fomenté par Washington qui expose les vulnérabilités de l’Occident. Extrêmement dépendante du gaz russe, “l’Europe a peut-être reçu une balle dans le pied des sanctions américaines”, prévient jeudi le nationaliste Global Times. La Chine et l’UE, “en tant que grandes puissances, grands marchés et grandes cultures (…) doivent apporter des agents stabilisateurs dans un monde troublé”, a déclaré Xi Jinping cité par le compte chinois de la crise ukrainienne”. .

-“Frauduleux”- “L’idée d’une sécession de la Chine vis-à-vis de la Russie est trompeuse : lorsque la guerre en Ukraine prendra fin, les Etats-Unis se focaliseront principalement, et non de manière amicale, sur la Chine, qui a donc intérêt à maintenir sa coopération.” Sylvie Bermann, ancienne ambassadrice de France à Moscou et Pékin, modère son voisin. Le président du Conseil européen Charles Michel (l), le chef de la diplomatie européenne Josep Borrell (d) et la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen lors d’une téléconférence avec le Premier ministre chinois Li Keqiang, le 1er avril 2022 à Bruxelles (PISCINE / Olivier Matthys) Et rappelez-vous que de nombreux pays (Inde, Pakistan, Afrique du Sud, Brésil, etc.) refusent également de critiquer Moscou. Mercredi, le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov, en visite à Pékin, a réaffirmé l’amitié “illimitée” des deux pays avec les Etats-Unis au nom d’un nouvel “ordre mondial multipolaire”: une vision nourrie par une inquiétude “d’émergence autoritaire” bloc contre l’Occident. Dans ce contexte, “le risque est que +la Chine sur-vende+sa neutralité (pour l’Ukraine) pour recevoir des concessions, comme la reprise des négociations sur l’accord d’investissement” signé par Bruxelles et Pékin fin 2020 avec A l’initiative de Berlin, prévient Valérie Niquet de la Fondation pour la recherche stratégique. La ratification de l’accord est gelée aujourd’hui par les sanctions de l’UE pour punir le recours au travail forcé dans la région chinoise du Xinjiang et les manifestations de Pékin contre les eurodéputés et les chercheurs. A cela s’ajoute le conflit autour du blocus des importations chinoises en provenance de Lituanie suite à l’ouverture d’une délégation taïwanaise dans ce pays.